Notre pays n'a jamais connu un tel état d'effondrement total qu'aujourd'hui sous le règne du populisme, de la médiocrité, de l'incompétence et de l'échec - surtout après que la volonté populaire et l'espoir d'un changement pacifique par les urnes ont été détournés. La Tunisie est maintenant confrontée à une crise multidimensionnelle qui jette une ombre sur la nation, rendant l'avenir source d'anxiété et de peur pour la majorité des citoyens. Cela n'a fait qu'approfondir le sentiment national de désespoir et de dépression.

Que pouvons-nous attendre d'un président qui a fait de la démolition un mode de gouvernance, ne laissant aucun domaine vital sans le saper ? Qu'il s'agisse de la loi, des institutions de l'État, de la jeunesse et de ses rêves, de la société civile et de la politique, de l'économie et du pouvoir d'achat, de la confiance publique, de l'unité et de la solidarité, de la liberté d'initiative, de la liberté d'expression et d'association, du droit à la dissidence, ou des valeurs de mérite et de compétence... Un président qui a apporté avec lui un système qui a ciblé les entrepreneurs, les investisseurs et les innovateurs, tout en restant inactif face à l'exode alarmant de la jeunesse du pays, de ses talents et de ses meilleurs éléments... Un système qui a affaibli l'administration publique, discrédité les fonctionnaires et les a utilisés comme boucs émissaires pour son propre échec...

Face à ce cauchemar qui plane sur notre pays - et par notre ferme conviction du droit de notre peuple à une vie meilleure - nous avons choisi de nous tourner à nouveau vers le peuple par le biais d'élections. Nous avions espéré que les élections serviraient de meilleur moyen pour réaliser un changement pacifique et initier les batailles du sauvetage et de la réforme. Nous avions envisagé un concours d'idées, de projets et de programmes dans lequel les Tunisiens pourraient choisir les plus capables de diriger la nation et de porter leurs espoirs - surtout à ce moment crucial pour notre pays et dans un monde en transformations profondes, où les dynamiques internationales sont devenues des facteurs critiques dans la formation des destins des nations.

Cependant, pour ceux qui considèrent les élections comme une question d'"existence ou d'extinction" et une "bataille de libération nationale", tous les moyens ont été déployés, grâce au contrôle autoritaire et à la concentration de tous les pouvoirs, pour manipuler la volonté populaire et priver les Tunisiens d'une véritable opportunité d'améliorer leur sort et de rompre avec l'héritage d'incapacité, de médiocrité et d'échec.

Malgré tout cela, notre détermination à poursuivre la lutte pour le droit de notre peuple à une vie meilleure reste inébranlable - surtout à la lumière des changements régionaux et internationaux et de l'instabilité mondiale croissante, qui ont tous compliqué davantage la situation dans notre pays.

• L'aggravation du phénomène de migration irrégulière vers et depuis la Tunisie (en particulier la fuite continue des cerveaux intellectuels et professionnels du pays)
• La guerre russo-ukrainienne en cours qui continue d'alimenter des taux d'inflation en spirale et des augmentations brutales des prix alimentaires
• Les atrocités commises contre le peuple palestinien et la confrontation israélo-iranienne en cours, avec ses effets déstabilisateurs sur toute la région arabe
• Les relations tendues et refroidies dans notre environnement régional, entre les États voisins eux-mêmes et entre eux et leurs partenaires traditionnels
• Les développements récents en Libye et leurs implications directes pour notre propre pays
• Les conséquences du changement climatique et du réchauffement planétaire : sécheresse, pénurie d'eau, incendies et tempêtes fréquents, et élévation du niveau de la mer. Pendant ce temps, les changements technologiques rapides, tels que la numérisation et l'intelligence artificielle, affectent de plus en plus notre économie, notre sécurité nationale et notre souveraineté... Ce sont tous des défis urgents et à fort impact. Pourtant, ils restent absents de l'agenda d'un régime populiste et incompétent qui est préoccupé uniquement par le maintien de son emprise sur le pouvoir et le silence de la dissidence et des voix libres.

Parce que nous sommes profondément engagés à libérer plus de voix et à élargir la portée de la participation citoyenne, il est naturel que nous travaillions à mobiliser tous les segments de la société, afin que chaque Tunisien, depuis sa position, puisse contribuer au devoir national de sauvetage et en faire une priorité nationale. Cette autonomisation permettrait aux citoyens de devenir les gardiens fidèles de nos principes et réalisations fondamentaux - et la première ligne de défense contre toute tentative de les déformer, de les inverser ou de les détourner, comme nous le constatons actuellement.

Aujourd'hui, il est devenu impératif de déplacer la bataille pour le sauvetage des confins du cercle des élites vers la société en général, de la lutte factionnelle isolée vers l'engagement civique et public généralisé. Cela ne doit pas devenir un prétexte pour régler des comptes, commettre de nouvelles injustices contre notre peuple, approfondir les divisions ou enflammer davantage la situation nationale...

Si sauver la Tunisie est un devoir national, alors le poursuivre par des moyens légaux, légitimes, pacifiques et éthiques est une obligation morale - que nous ne devons jamais abandonner en aucune circonstance...

L'injustice ne doit jamais être rencontrée par plus d'injustice. Les fins nobles ne peuvent être atteintes par des moyens douteux ou corrompus. La médiocrité ne peut être rencontrée par plus de médiocrité. Et le sauvetage de notre nation ne peut être réalisé en divisant les Tunisiens, en répandant la haine et le ressentiment, en violant la dignité des gens, ou en ternissant les valeurs et la réputation de notre patrie, chez nous ou à l'étranger.

"Le changement commence de l'intérieur", dans la capacité des individus et des communautés à s'adapter aux réalités changeantes et à absorber les nouveaux développements. La vie politique en Tunisie n'est "pas un fleuve calme et régulier"... Après le moment électoral, qui a davantage exposé et mis à nu la nature autoritaire du régime populiste et erratique, il est devenu essentiel d'absorber la déception d'un "espoir brisé de changement" et la manipulation de la volonté populaire, puis de se regrouper et de reprendre la bataille pour le sauvetage et la réforme.

Notre lutte n'est pas une lutte pour le pouvoir, ni un combat pour l'influence, ni une course aux positions. C'est une bataille du peuple... une lutte de la nation... un combat pour l'avenir... Une bataille que nous avons choisi de mener, armés de foi dans la noblesse de notre cause, la légitimité de notre objectif, la solidité de notre chemin, et la ferme conviction qu'elle aboutira, par la volonté de Dieu, à la fin de la tyrannie, à la chute de l'autoritarisme, et au retour de la voix du peuple à travers des élections libres, équitables et démocratiques dans lesquelles ils détermineront leur propre destin.

En anticipation de tous les scénarios possibles, nous nous sommes engagés à préparer une vision stratégique basée sur trois phases distinctes, chacune avec ses propres objectifs, moyens et méthodes. Chaque phase est façonnée par des thèmes évolutifs et des principes directeurs qui reflètent les impératifs du moment.

• La première phase est la lutte légitime et nécessaire contre l'autoritarisme (c'est la "Phase de Sauvetage")...
• La deuxième phase est la transition post-autoritaire délicate, nécessitant des mesures rapides pour restaurer la confiance publique dans la politique, le pays et son avenir (la "Phase de Confiance")...
• La troisième phase est la mise en œuvre des grandes réformes attendues depuis longtemps nécessaires pour ramener la Tunisie à sa place légitime et à son éclat passé (la "Phase de Réforme").